Béatrice D., pré-pensionnée, a participé à l’atelier de simplicité volontaire (SV) d’Ages & Transmissions pendant 2 ans.
Quelques réflexions personnelles
Aussi loin que je me souvienne, je pense n’avoir jamais eu de gros besoins. Bien qu’étant issue d’un milieu aisé, sans contraintes pécuniaires, j’aie été élevée dans le souci d’économies. On ne gaspillait pas et pour cause mes parents ont connu la guerre et les privations. Ceux-ci ne sont plus là, mais je connais beaucoup de personnes de cette génération qui vivent modestement obligatoirement ou volontairement. Nous discutons souvent sur l’évolution de la société par rapport à leurs vécus. Je pense que depuis quelques décennies l’on a créé des besoins pour manger, se vêtir, travailler, pour occuper ses loisirs, pour vivre tout simplement, et ceci pour des raisons économiques évidentes . Quand je voyais il y a quelques années à la St Nicolas et à la Noël, les montagnes de jouets aux caisses des grandes surfaces, je trouvais cela affolant !
Est-ce nécessaire pour prouver notre amour à nos enfants ? Voulons-nous une planète dégradée suite à ces achats intempestifs ?
J’aime mieux ce vieil adage indien :"Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants". C’est très parlant ! Nous avons beaucoup à apprendre de ces civilisations d’ Amériques du nord et du sud qui vivaient en symbiose avec la nature. Ces civilisations prestigieuses, premiers citoyens de ces nations qui vivent actuellement dans des réserves ou dans la misère. Et je ne parle pas aussi du dommage fait à l’Afrique, de la traite des noirs (déportation de millions d’individus étalée sur quatre siècles) à la colonisation, le pillage et l’exploitation des ressources naturelles. Il y a une période de ma vie ou j’ai lu beaucoup d’ouvrages et de documents sur ces peuples que les conquistadors, les pionniers et autres colonisateurs ont chamboulés. J’ai souvent pensé que la liberté réelle était de ne rien posséder, d’être le plus possible détachée des choses matérielles, mais c’est difficilement réaliste et réalisable.
Sans aller jusqu’à cet extrême, il y a moyen de simplifier sa vie, de ne plus s’encombrer de choses qui nous rendent finalement très dépendants. Mais aller dire cela à des gens qui travaillent beaucoup, à contrario à ceux qui ne travaillent pas (chômeurs, allocataires sociaux) et ont du mal à joindre les deux bouts, cela peut s’avérer difficile.
Cependant je peux comprendre, les charges sont lourdes et tout est fait pour solliciter les gens à acheter compulsivement, pour faire tourner la société de consommation. Quid de tous ses annonceurs qui abîment nos villes et nos campagnes avec leurs affiches. Certains n’hésitent pas et parlent d’agressions ! Et je pense qu’ils ont raison. Personnellement je suis très peu perméable à la pub. Néanmois, je me suis surprise à la regretter à la TV, lors d’un bon film servant "d’entracte-pipi" !
Plaisanterie à part, ne pourrait-on imaginer d’utiliser plutôt ces panneaux publicitaires avec des œuvres d’artistes, des renseignements pour des musées, des animations, des activités artistiques, musicales gratuites ou à des prix modiques.
Privilégier des rencontres conviviales est plus important que ce sacro-saint pouvoir d’achat qui nous anesthésie, nous matraque.
Il faudra bien cependant revenir à des normes plus raisonnables, sans être adepte de la décroissance ou de la simplicité volontaire absolue. Comme le disait Coluche « n’allez plus dans ces grandes surfaces ou ces grands complexes d’achats, il n’ y aura plus rien à vendre ».
Pour en revenir à la gratuité, un livre m’ a beaucoup intéressé « Le green deal » de J.M. Nollet, et le chapitre édifiant sur le P.I.B. ( produit intérieur brut) national et sur les données de cet indicateur que l’on ne prend jamais en compte. Par exemple : le P.I.B ne reflète pas le niveau réel d’une démocratie ; un pays peut avoir une croissance forte mais être une dictature. La construction d’une école ou de canons pour un million d’euros pèsent la même chose. Les légumes et les fruits des potagers et vergés partagés entre voisins, les productions domestiques , le bénévolat ne sont pas pris en compte par le PIB. Autre exemple : un professeur donne cours de langue à l’institut Berlitz le matin, l’après-midi en sixième primaire et le soir dans un groupe d’alphabétisation ; le matin pèsera le plus lourd. Pourquoi ?
Je connais beaucoup de gens qui travaillent et font du volontariat dans l’associatif, le sport, l’engagement citoyen ou politique. Parfois ce sont des chômeurs qu’on qualifie un peu trop vite de parasites. Certains profitent du système mais c’est une minorité, pour la plupart ce n’est pas un choix.
De manière générale, je considère qu’il faudra réapprendre la solidarité, la gratuité, réapprendre à donner du temps, de son temps plutôt que de l’argent ou des cadeaux. Ce n’est pas toujours bien perçu. Ce sont des habitudes anciennes qui se sont perdues et qu’il serait bon de retrouver.
Ma démarche personnelle
Je suis végétarienne depuis longtemps mais j’ai du mal à convaincre mes deux carnivores (mari et fils) d’en faire autant. Je préfère faire mes courses dans les petits commerces ou supérettes de quartier. J’achète bio si possible ou des légumes et fruits de saisons ainsi que des produits issus du commerce équitable. J’évite autant que possible les grandes surfaces pour ne pas les engraisser ! J’ai la chance d’avoir hérité de la maison familiale avec meubles et vaisselles et tutti quanti ! En ce qui concerne les achats de vêtements et de livres, je vais dans les brocantes, les magasins de seconde main. Je n’ai jamais très bien compris cet engouement pour les marques. J’ai toujours détesté le shopping. En revanche, j’adore chiner et traîner dans les bibliothèques ou chez les bouquinistes. J’aime cette idée qu’un objet ayant appartenu à d’autres se retrouve dans mes mains et qu’à mon tour je le laisse à d’autres.
J’ai une petite voiture que je n’utilise qu’occasionnellement. Je préfère la marche et les transports en commun. Je me sens plus libre. Même s’il faut parfois les attendre un peu, j’ai toujours un livre ou le journal avec moi.
Je ne travaille plus, je suis pré-pensionnée. Je fais du volontariat pratiquement à temps partiel dans un centre d’accueil de jour pour personnes âgées et je participe aussi au coup pouce langage et lecture dans une école primaire. Je suis valide et peux me rendre utile. Je suis militante écolo. Par conséquent, je côtoie beaucoup de gens qui sont dans cette même démarche. Dans mon entourage proche, ce n’est pas le cas.
J’ai un portable que j’utilise modérément, par contre je corresponds sur le net, c’est un outil très performant. J’envisage même de suivre une formation pour progresser dans ce domaine. J’aime bien la télévision, j’aurais du mal à m’en passer mais je sélectionne beaucoup les programmes.
Je ne voyage plus, sauf lors de courts et proches séjours. Je comprends que les plus jeunes soient attirés par les voyages lointains. Ma fille et son compagnon sont cadres, relativement bien payés et travaillent beaucoup. Ils n’ont pas encore d’enfants et veulent en profiter maintenant pour voyager. C’est difficile de les dissuader.
Professionnellement, j’ai travaillé dans la vente pendant quelques années. Ensuite, j’ai suivi une formation pour m’insérer dans le non-marchand, comme aide-soignante. Je me suis tout de suite sentie bien plus utile, tandis que vendre même des livres à tout prix, c’est pénible ! Je compatis lorsque je vois des employés de banque, de magasins ou autres qui sont tenus de traquer, harceler le client. Rentabilité oblige !
Lors des ateliers d’Ages et Transmissions sur la SV nous confrontons nos idées, nos réflexions qui se croisent, divergent quelque peu. C’est un moment d’échanges et de partages intense, passionné et passionnant. Souvent, on passe pour des radins, des empêcheurs de tourner en rond, mais pour chacun d’entre nous, cette démarche est issue de mûres réflexions, d’un long cheminement de vie. Nous devons faire comprendre aux autres, à notre entourage que c’est une motivation très profonde, et pas nécessairement contrainte.
A plusieurs périodes de ma vie j’ai appliqué ce concept de simplicité volontaire sans le savoir, par exemple : la jeunesse (baba cool !), puis plus contrainte (vers les 30-40ans) et actuellement de façon plus réfléchie.
En espérant qu’avec le temps et l’exemple nous ferons tâche d’huile. Pour résumer et pour conclure je pense qu’il faudra de toute manière dans l’avenir vivre plus simplement et pour se faire il vaut mieux procéder par palier, progressivement. C’est le conseil que je donne aux réfractaires. A force d’arguments, j’ai parfois réussi à en faire douter un, ne serait-ce qu’un moment ! C’est déjà ça !
jeannineK Répondre
j’apprécie ton témoignage ; je suis moi aussi retraitée et sans être radin comme tu dis, j’applique certaines habitudes de non gaspillage
je participe à une bibliothèque tournante organisée par ma belle fille , grande lectrice
entres collègues et amis les livres achetés tournent chez chacun tous les mois
nous payons 25€ pour lire 10 livres récents dont le dernier nous restera
je vais à la bibliothèque communale où je trouve un beau choix de livres et où je peux lire les hebdomadaires que je n’achète pas
je visite avec plaisir les brocantes , les magasins Oxfam , seconde main et je trouve toujours des chouettes vêtements presque neufs
pour mes petits enfants les jouets que je choisis sont issus de brocantes, bien lavés avant de les offrir
j’ai déniché un superbe berceau en osier à 5€ pour mon futur petit fils ( voir au magasin 170€)
je suis scandalisée par la profusion de lingettes que les pubs nous offrent pour l’entretien
j’utilise le vinaigre pour les sanitaires et je récupère les bouts de savonnettes, je les fais macérer dans l’eau d’un bocal
et voilà une excellente pâte pour faire briller les inox
restons attentifs à tous ces petits gestes autant que possible et ne nous laissons pas prendre au jeu du plus blanc que blanc