Jean P., 88 ans, est membre d’Ages & Transmissions depuis sa création. Il n’a pas participé aux ateliers de simplicité volontaire et fait partie des « sceptiques ».
Après avoir lu les témoignages personnels des participants des ateliers de simplicité volontaire (SV), il me semble intéressant de faire part de la façon dont je les ai perçus. Dans ces écrits, la simplicité volontaire y est exprimée comme un mode de vie basé sur la sobriété : sobriété dans la nourriture, dans la mobilité, dans les vêtements, dans l’utilisation de l’énergie. Tout cela avec une note écologique et un désir de relations conviviales.
Je me suis posé la question : quels sont les motifs qui me feraient adhérer à la SV ?
Bien sûr, je fais partie de la société. Pendant une grande partie de ma vie, j’ai vécu immergé dans la pensée dominante préconisant la recherche de la croissance et corollairement de la consommation. Cette pensée dominante n’est plus actuellement monolithique ; elle se fissure et ce depuis déjà le rapport du Club de Rome en 1972 préconisant la halte à la croissance. Les brèches se sont encore élargies avec l’apparition catastrophique des effets du réchauffement climatique.
Il me semble qu’aujourd’hui dans notre pays, chaque citoyen est conscient des risques des changements climatiques et qu’il peut aussi contribuer à les réduire en diminuant sa consommation d’énergie : soit en conditionnant son habitat, soit en ayant recours à des sources d’énergie naturelle, soit aussi en utilisant des moyens de déplacement écologiquement propres ou moins polluants.
Sur ce point, préconisant la sobriété dans l’utilisation de l’énergie, je ne puis qu’adhérer à la SV.
En ce qui concerne la nourriture, les témoignages marquent une nette préférence pour le « bio » consommé frugalement. Je me pose la question : la nourriture bio n’est elle pas une nourriture des pays riches ? Est-il pensable qu’une agriculture « bio » puisse nourrir la population mondiale alors que les cultures traditionnelles y arrivent difficilement quant elles y arrivent. N’y a-t-il pas d’autres voies ?
Manger frugalement sans pour cela manger « bio » pour autant que le « frugal » ne conduise pas à une carence vitaminique ou à une dénutrition et n’exclue pas complètement viande ou poisson, me parait acceptable et ce d’autant que les « ateliers du bien vieillir » conseillent également le manger frugal mais avec un zest de saveur.
S’engager dans la SV,alors que la pensée dominante même chancelante reste la croissance par la consommation, demande un certain courage. C’est aller à contre courant . Mais est-ce suffisant ? La SV peut –elle changer le monde parce qu’elle préconise de remplacer la surconsommation par de la frugalité ? la société peut elle trouver dans le recours à la frugalité et à la simplicité des motivations suffisantes pour changer son comportement ?
Dire aux générations montantes « soyez frugales ! » ne me parait pas un objectif qui soulèvera l’enthousiasme et emballera les imaginations. Si la SV prône pour l’individu un comportement et une façon de vivre au quotidien, elle n’a pas une vision de l’avenir de la société, elle ne dit pas comment et quelles mesures prendre pour combattre les menaces exercées sur l’environnement et comment réorienter la société vers un futur plus souriant.
Dans les témoignages je trouve aussi cette incertitude relative à l’avenir de la société si la SV devenait majoritaire.
Je n’ai pas la prétention ni la capacité d’indiquer la voie à suivre, mais j’adhère à la pensée de C de DUVE( cfr « Génétique du péché originel – le poids du passé sur l’avenir de la vie ») lorsqu’il écrit « l’éveil écologique des cinquante dernières années a été extraordinairement bénéfique à ce point de vue, et le mouvement qu’il a engendré pourrait être d’une immense importance pour l’avenir de la planète » et il ajoute « les partis verts devraient être mondialement dominants. Mais il faudrait pour cela que leurs meneurs se débarrassent de leur frange extrémiste, irrationnelle et démagogique et s’allient avec les scientifiques plutôt que les combattre. »
La science et les technologies liées à l’écologie affranchie de sa tranche irrationnelle pourrait ainsi devenir un moteur assez puissant pour entraîner une modification de comportement humain et améliorer considérablement l’état de la planète.
Jean N Répondre
Ces réflexions de Jean P. sont mesurées, tolérantes. J’ai son âge et je n’ai rien à ajouter à ce qu’il a si bien écrit. Deux préceptes retenus de mes leçons de latin ont guidé ma vie : Carpe diem, mais in medio virtus. Je crois avoir saisi les moments qui passent et profité des bonnes choses de la vie, mais avec modération.