Ah l’expo 58 ! Que de joies, d’émerveillement, d’espoirs dans un monde meilleur et pacifié où tout n’était que fraternité et désir de connaître l’autre…L’âge d’or des années sixties se profilait avec son insouciance, sa confiance en l’existence , sa foi en un avenir prometteur, son optimisme.
L’objectif de l’expo était affirmé dans la formule « Un bilan du monde pour rendre celui-ci plus humain » !
Comme bon nombre de personnes qui ont pu vivre ces moments magiques, j’en ai gardé un souvenir extraordinaire…
L’expo a ouvert ses portes le 17 avril et pour moi, petite lycéenne qui terminais sa rhéto, je fus amenée à participer étroitement à l’évènement ce qui me remplit de fierté et me fis prendre conscience que j’étais enfin devenue une jeune personne à part entière :
Papa avait en effet été associé au projet de réalisation du Pavillon Philips dont l’élaboration graphique avait été confiée au célèbre architecte Le Corbusier. A l’intérieur : une véritable ode à la musique : la diffusion du poème musical électronique de Varèse.

Au jour dit mes parents furent naturellement conviés à l’inauguration officielle du bâtiment qui se profilait tel un voilier à 2 voiles de béton d’une rare élégance .
Ils avaient pris la décision de m’emmener avec eux et je vécus donc l’ivresse du moment avec une rare intensité !
Pour l’occasion : large robe de plumetis fleuri follement juponnée et légèrement décolletée ; aux pieds des ballerines blanches, un petit collier de perles fines prêté par maman et un somptueux chignon qui retenait mes longs cheveux de l’époque !
J’étais devenue une vraie princesse et vivais un véritable conte de fée !
Munis de laissez passés officiels, véhiculés dans une voiture de la société conduite par un chauffeur, nous eûmes donc le privilège de pénétrer dans l’expo le premier jour et de voir de près , le Prince Albert couper le cordon qui barrait l’entrée du pavillon.
Toutes les personnes présentes assistèrent en suite au feu d’artifice spectaculaire donné sur l’esplanade des Grands palais.

Notre famille royale ne chômait pas ces jours là :chacun était à pied d’œuvre pour les inaugurations successives et pour l’accueil des personnalités accourues du monde entier.
Il convient de rappeler que l’expo attira plus de 40 millions de visiteurs en 6 mois d’existence !
Chaque jour au journal télévisé, en noir et blanc de la seule télévision belge, les téléspectateurs voyaient atterrir les grands de ce monde mais aussi un flot incessant de personnalités du monde des spectacles, du sport et des arts .Nous avions l’impression que la petite Belgique était devenue le centre du monde !
Chez nous ce fut un défilé incessant de parents ou d’amis venus de France, d’Angleterre, voir même des Etats-Unis…Nous les hébergions à tour de rôle puis les guidions avec un plaisir et une fierté toujours renouvelés le long des larges allées survolées par de petites nacelles vertes et jaunes pour leur faire découvrir les divers pavillons et attractions.
Et le soir , rituellement nous clôturions les visites à La Belgique Joyeuse pour leur faire savourer les bonnes gueuzes belges pendant que nous les jeunes nous dansions le Rock ‘n Roll à perdre haleine.

Munie d’un abonnement que j’ai toujours gardé en souvenir, je prenais le tram et rejoignais au moins 3 ou 4 fois par semaine mes copains et copines à l’Expo ; le week -end c’était les parents qui nous emmenaient manger des paellas au pavillon de l’Espagne ou des raclettes et fondues au Pavillon suisse.
Entre l’insolante beauté du pavillon américain précédé de sa pièce d’eau aux jets multiples présentant toutes les modernités et commodités possibles notamment en matière de télévision couleur, et l’arrogance du Pavillon soviétique où dominaient les références à la conquête de l’espace, les fresques aux statues colossales célébrant le communisme triomphant mais aussi les produits alimentaires comme le caviar et le saumon, notre choix se portait aussi sur de petites structures plus exotiques tels celles de la Thaïlande, en forme de temple bouddhiste, la Hollande avec ses tulipes, ses jacinthes et ses vaches, le Brésil et ses jolies danseuses de samba, le Congo présentant des animaux empaillés mais aussi de « vrais autochtones » en train de sculpter des objets décoratifs …
Je n’ai plus que des flashs dans ma mémoire : un décor magique, un kaléidoscope de couleurs, de sons, une ambiance de folie et de gaieté, une insouciance totale….
C’était aussi l’année de mes 18 ans et de 4 mois de vacances qui marquaient la fin des études secondaires et l’entrée en octobre à l’Université libre de Bruxelles, la fin de l’adolescence vécue dans une totale apothéose.

2 commentaires Répondre

  • freddo Répondre

    belle page émouvante de cet èvenement historique que j ’ai aussi connu adolescent.

  • J.K Répondre

    sophie,
    ton enthousiasme pour ces souvenirs que tu évoques avec autant de plaisir me réjouit et je constate que tu as toi aussi gardé ce fameux abonnement Expo 58, preuve irréfutable "j’y étais !"
    nous avions je pense l’âge idéal pour en profiter totalement :
    libres, jeunes et curieuses ! merci pour cette évocation si bien décrite

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