Si actuellement un retraité peut espérer un parcours de vie qui s’étend sur trois décennies, il est tout aussi évident que les centres d’intérêts et les engagements d’un aîné de 85 ans ne sont pas les mêmes que ceux d’un jeune retraité.
Comment évoluent les engagements et activités en fonction du temps ?
Même si la division est artificielle, on pourrait, pour plus de clarté diviser la vie des retraités en trois décennies : une décennie jusque 70 ans, la deuxième jusque 80 ans et la dernière après 80 ans. Les étapes ainsi déterminées, il conviendrait de les analyser afin de faire ressortir leurs caractéristiques.
Certes, il est difficile de schématiser la vie des aînés tant les parcours individuels sont variables, dépendant du génome, de la personnalité, du parcours de vie, du niveau socioprofessionnel et culturels, des moyens financiers. Pour tout un chacun, les phénomènes de vieillissement ne vont pas nécessairement survenir au même âge, avoir la même durée et la même intensité. Il n’empêche : chacun va passer par des phases semblables. Ce sont ces phases que l’on peut essayer de mettre en évidence.
A l’heure de la retraite, 60 ou 65 ans, l’individu est brusquement libéré de la contrainte du travail ; il se devra de s’adapter. Comme l’heure de la retraite lui était connue et qu’il a pu la préparer, ce changement ne sera pas vécu comme une crise identitaire mais comme un ajustement plus ou moins rapidement exécuté. Il va ainsi réaliser plusieurs projets dont il avait rêvé et qui vont compenser la frustration d’être sorti de la vie active : il va voyager, voir le monde, se distraire. Bientôt, il va cependant chercher des activités pour permettre à ses ressources et à son énergie de s’exprimer. Il va s’engager dans le bénévolat, dans la garde et la surveillance de ses petits-enfants, ou encore il va exercer un violon d’Ingres ou s’intéresser à la politique.
C’est la retraite « épanouissement ».
C’est le dernier moment où il est encore possible d’activer certaines potentialités encore inexplorées.
Au seuil de la deuxième décade, le retraité va davantage structurer ses activités. Il va peut-être diminuer le lointain de ses voyages et moins s’engager dans de nouvelles activités. Dans la seconde partie de la décennie, ses capacités physiques diminuent et son psychisme devient plus fragile. Il va devoir faire face à des crises identitaires qui vont nécessiter de nouvelles adaptations . Il abandonnera certaines de ses activités ou habitudes qui sont devenues trop fatigantes et les remplacera par des activités qui demandent moins d’efforts. Le réseau de ses relations s’amenuise, des amis disparaissent. Sa capacité de réagir aux agressions physiques ou psychiques, sa résistance auront une influence positive sur sa santé et sa longévité.
C’est au début de la troisième décade que l’on entre dans une période de vulnérabilité, de solitude, et de repli aussi vers l’espace domestique. Il faut pourtant se réjouir car plus de la moitié des octogénaires vivent une vie sans dépendance et restent alertes physiquement et intellectuellement. Il faut se réjouir, car si on l’exerce, la plasticité du cerveau est telle qu’on peut vieillir en conservant sa capacité intellectuelle. Pour vieillir dans de bonnes conditions, on se doit d’imposer à son corps et à son esprit des efforts quotidiens.
La troisième décade,dans sa seconde moitié, est aussi celle ou les crises identitaires sont les plus dramatiques. On doit faire face à la disparition d’êtres chers, à des défections physiques, à la démotorisation, à l’isolement. Pour en sortir, il faut mobiliser toutes ses ressources, faire appel non seulement à un questionnement interne, à une négociation avec soi-même et à des transactions relationnelles avec autrui, faire appel, si nécessaire, aux services aux personnes et avoir beaucoup de courage pour faire face et s’adapter. Il faut faire preuve d’imagination pour trouver des solutions qui puissent satisfaire son moi tout en évitant de s’enfermer dans la solitude en restant en prise avec le monde.
Dans l’ultime décennie, les phénomènes de vieillissement se manifestent généralement par un repli plus prononcé sur l’espace domestique. Le grand âge se caractérise aussi par un plus grand isolement, une moindre sociabilité, un physique plus abîmé, et aussi, parfois, un besoin d’une assistance consciente qui corrige la déficience de son réseau social.
On va voir surgir deux types de comportements.
Il semble que pour certains, l’étrangeté du monde soit devenue une réalité car non seulement ils ont perdu leurs repères mais que ce soit par fatigue ou diminution de l’appétence à vivre, ils refusent de s’adapter. Ils n’ont plus la volonté de se forcer à comprendre. C’est dans ce cas le repli sur soi, sur son corps biologique, c’est le prélude à la finitude.
Heureusement aussi ,des personnes très âgées restent engagées et revendiquent une position de compréhension et d’ouverture par rapport au monde. Même diminuées physiquement, même marquées par la diminution de leur cercle de connaissances, il leur reste la volonté de ne pas se laisser aller et de rester en relation, si limitée soit-elle, avec le monde. Ils continuent à faire face, réfléchissent et communiquent.
mariéeseule Répondre
J’admire la lucidité de votre réflexion,ce qui est difficile à vivre c’est la différence dans un couple ,les modifications comportementales ne se font pas en même temps pour les 2. Que faire quand on a encore envie detant de rencontres et que l’autre est déjà dans le repli ? Entre homme et femme ,exsiste déjà une différence. L’éloignement seul peut redynamiser l’élément positif du couple ,la prise d’autonomie,mais un immense chagrin au retour entre le vécu exrérieur et l’immobolisme auquel il faut à nouveau faire face.