1952 - SAINT-NICOLAS !
Les premiers jours de décembre, comme chaque année, nous attendons la visite de St Nicolas, qui, accompagné du père fouettard, se rendait de maison en maison pour prendre commande des jouets désirés par tous les enfants du village. Depuis plusieurs jours, nous sommes très sages, faisant de gros efforts pour ne pas nous disputer, surtout à partir de 17hrs, car nous savions que le grand saint faisait sa tournée entre 17 et20 heures.
Dans la cuisine, éclairée d’une seule ampoule, à l’abat-jour recouvert de dentelles, nous nous tenons tous autour de la table. Quelques-uns jouent aux cartes, d’autres au jeu de l’oie, les plus grandes terminent leurs devoirs. Dehors, la nuit est tombée, il neige et, par la fenêtre sans tentures, nous guettons l’apparition de la lueur d’une torche, mais, rien ! Saint Nicolas ne viendra pas ce soir. Déçus, nous soupons et montons nous coucher.
Bonne nuit, nous dit maman, si vous êtes bien "vaillants" (sages) St Nicolas viendra demain !
Le lendemain, toujours rien, mais nous gardons espoir car ce matin, il avait déposé quelques spéculoos dans nos chaussures.
Puis, un soir, maman nous dit : "taisez-vous et écoutez !", je crois que St Nicolas arrive, j’entend tinter une clochette. Peu rassurés, nous nous groupons autour de maman, le tintement s’intensifie ... on frappe à la porte ...
Qui est là, demande-t-elle ?
C’est Saint-Nicolas et père fouettard !
Entrez, la porte est ouverte.
Nous, les yeux éblouis, le cœur battant nous nous retrouvons devant le grand saint tant attendu. Il nous impressionne, car, pour chacun, il connaît nos résultats scolaires, nos petites et grandes bêtises. Père fouettard gronde un peu les garçons, les menace de sa baguette car maman lui dit qu’ils ne sont pas très obéissants ! Tour à tour, St Nicolas nous demande ce que nous souhaiterions comme jouet et en prend note dans un grand cahier recouvert de velours rouge. Après nous avoir fait promettre d’être sages, il nous distribue des bonbons, puis nous quitte, car, dit-il, ma tournée est encore longue !
Nous, bien au chaud dans nos lits, pensons à lui, qui, dans le froid et la neige rend visite à tous les enfants.
Le 5 décembre, veille du grand jour, nous préparons chacun une assiette dans laquelle nous disposons sucre et carottes pour l’âne de St Nicolas. Sur chaque assiette, maman ajoute un petit carton avec nos prénoms. Très nerveux, nous allons nous coucher, nous dormons très peu et sommes réveillés très tôt, attendant avec impatience que maman nous autorise à descendre et nous ouvre la porte de la chambre à côté de la cuisine. Alors, de tous côtés, fusent des cris de joie et des "MERCI SAINT-NICOLAS" !
Nos assiettes vidées des sucres et carottes, sont maintenant remplies de spéculoos, nic-nacs, mandarines, noix, cacahuètes. Nous recevions chacun 1 jouet ou, parfois, un jouet pour deux. Annie et moi avions reçu une belle poupée aux cheveux longs et bouclés, aux yeux mobiles et qui, quand on la couchait sur le ventre disait maman. Nous avons longtemps joué avec cette poupée, sans nous disputer.
Un de mes plus grand chagrin d’enfant fût, quand papa, rebouchant le vieux puit, jeta parmi tous les débris mon cheval de bois. Il n’avait plus queue, ni crinière, ses yeux n’étaient plus visibles, mais, c’était mon cheval, et, à 6 ans, je l’aimais beaucoup. Longtemps j’ai voulu creuser et remuer la terre à cet endroit pour le retrouver.
Laure Répondre
Je ne me souviens pas avoir cru en l’existence de Saint-Nicolas. Par contre, je me souviens avoir douté de sa "non-existence" ! J’avais 7 ans. Je vivais chez mon père momentanément. Je me souviens m’être endormie dans ma petite chambre le 5 décembre... pourtant, le lendemain, j’ai crû un instant avoir été transportée dans la caserne d’Alibaba. Il y avait des guirlandes de lumières sur les murs, des biscuits, mandarines, bonbons partout sur le sol et plein de jouets ! C’était tellement féérique que je me suis dit que ça ne pouvait qu’être l’oeuvre de Saint-Nicolas ! Comment mon père aurait-il pu entrer dans ma chambre et faire tout ça sans me réveiller ?!