S’il ressemble à « appétit », c’est parce qu’il est servi avant le repas pour, en principe, ouvrir notre appétit. Alléchant, il évoque le plaisir, la convivialité, la promesse d’un bon moment passé ensemble.
Pour moi, le mot "apéritif" contient un peu de nostalgie d’enfance.
Dans les années 1960, le ménage modèle se devait de « recevoir » ses invités selon certains codes, dont la proposition de l’apéritif :
- « Vous joindrez-vous à nous pour l’apéritif ? »
- « C’est bientôt l’heure de l’apéritif ! »
- « Puis-je vous servir un apéritif ? »
Mes parents ne buvaient pas d’alcool hormis parfois de la bière au repas le dimanche (de la double ou triple Piedboeuf). Néanmoins ils se pliaient au rituel lorsque nous avions des invités. Ma nostalgie n’est pas dans le la boisson elle-même puisque, en tant qu’enfants, nous n’étions pas autorisées à boire de l’alcool, mais bien dans l’occasion de participer à une ambiance de fête avec des invités de bonne humeur sous l’effet des vapeurs éthyliques. J’aimais aussi l’esthétique des bouteilles, le son des glaçons dans le verre, les couleurs chaudes et dorées des liquides qui paraissaient si savoureux.
Pour l’occasion ma mère « s’adonnait » à la cigarette avec un fume-cigarette, à l’instar des héroïnes de films américains des années 1950-1960 encore dans l’ignorance des méfaits du tabagisme. Elle ne fumait d’ailleurs qu’en société. Mon père lui, ne fumait pas et n’était pas prêt à céder aux mœurs de l’époque.
Il est fascinant aujourd’hui d’observer les films américains des années 1950-1960. Dans presque chaque scène d’intérieur, les personnages boivent et fument à répétition. Comme pour se donner une contenance, insérer un semblant d’action, une question d’image indéniablement. Celle d’un homme sûr de lui, viril et maître de son destin tel le fameux « cow-boy Marlboro » dont la publicité a envahi les écrans de télévision, les panneaux publicitaires et les magazines jusque dans les années 1980. Le marketing visait aussi la gent féminine en lui suggérant l’image de femmes sûres d’elles, dominatrices, dont la cigarette était un élément-clé de séduction.
Entre les deux guerres, les réclames murales pour les apéritifs étaient courantes.
Elles revendiquaient les qualités digestives de leur composant. Par exemple, le quinquina dans le Saint-Raphaël, l’artichaut dans le Cynar. L’argument de vente d’alors était d’ordre médicinal. Il n’est plus invoqué aujourd’hui.
Plus récemment, depuis les années 1970, la durée de l’apéritif a augmenté et ce moment s’accompagne de la consommation de différents produits conçus pour cette occasion. Le « moment apéritif » est un moment privilégié, un instant de communion qui a sa place dans une société parfois mise à mal par l’individualisme. Honorons ces moments de convivialité avec joie et modération. A votre bonne santé !