Extrait de "Nous racontons notre vie", à l’ONA, 2015-2016

Je m’appelle Bernadette. Je suis d’origine congolaise, née à Kinshasa il y a 33 ans, issue d’une famille de 10 enfants. Je suis en Belgique depuis 2007. Je suis venue ici pour me marier. J’ai 4 enfants : 3 filles et 1 garçon. Je suis demandeuse d’emploi et habite à Bruxelles. J’ai vécu dans les deux Congos : le Congo- Kinshasa et le Congo-Brazzaville. Ma maman est originaire des deux.

En Afrique, j’ai fait la coupe-couture. En Belgique, j’aimerais travailler dans des garderies d’enfants mais comme c’est difficile de trouver du boulot, je suis partante pour tout. Je peux même faire le ménage…

Entre le Congo et la Belgique

Je suis arrivée du Congo en 2007 à 24 ans pour rejoindre mon mari.

Je venais de me marier. Mon arrivée en Belgique s’est bien passée. Un premier choc a été la solitude. Ici, quand on ne travaille pas, c’est comme la prison, on est enfermé. Chez nous, on est tout le temps à l’extérieur, chez les uns, chez les autres. Un autre choc a été le froid, car je suis arrivée ici en février. J’ai eu mes quatre enfants ici et je me suis occupée de mon ménage. Ce qui a été très dur, c’est d’avoir des enfants sans aide. En Afrique, quand on accouche, il y a les tantes, et tout ça… Elles font les courses, nous, nous restons couchées. Il faut dire aussi que je ne vais pas beaucoup vers les autres, je ne parle pas beaucoup. Même dans la communauté congolaise, je suis toujours en retrait. C’est difficile pour moi de faire des rencontres. C’est ma quatrième année à Alpha-Andromède, et je m’exprime mieux en français.

J’aimerais bien retourner vivre au Congo si j’étais toute seule, mais pour les enfants non, je ne vais pas le faire car ils sont adaptés ici. Ils sont belges. Le Congo pour eux, c’est un peu difficile. Je peux y repartir avec eux pour des vacances mais pas pour y vivre.

Non, je n’ai jamais souffert de discrimination, je ne crois pas.

Des problèmes pour lire et écrire

Moi, j’ai honte d’avoir des problèmes pour lire et écrire. J’ai difficile à l’avouer. C’est dur pour chercher du travail. Je n’ai encore jamais travaillé en Europe ; j’ai envie mais c’est dur de savoir comment chercher, il faut demander de l’aide, il faut tout le temps chercher sur internet. Remplir des papiers aussi, c’est difficile.

Avant, je m’appuyais beaucoup sur mon mari. Maintenant, je me débrouille mieux mais parfois, je n’ai pas confiance en moi : je lâche, je panique et je préfère que mon mari ou ma fille le fasse pour moi. Mais si je me concentre, ça va.

L’école au Congo était en français. Je me débrouillais bien en mathématiques. Je ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à lire et à écrire. En Afrique, si tes parents ne savent pas payer l’école pendant un trimestre, tu ne peux plus aller à l’école. Quand finalement tu y retournes, les autres ont avancé. En Afrique, si tu t’en sors, tu t’en sors, mais si tu ne t’en sors pas, on te laisse là. Ma maman ne savait pas lire. Dans ma famille, il n’y a que moi, qui n’arrivais pas à lire.

Cela fait trois ans que j’ai commencé à apprendre à Alpha-Andromède. Mes enfants me demandaient : « Maman, je veux que tu me lises ça ». Je ne savais pas [larmes aux yeux]. Ma fille a 8 ans, elle sait lire comme moi. Je ne me décourage pas, mais c’est long, c’est dur. Parfois je veux faire plaisir à mes enfants : je leur fais la lecture. Et si je me trompe, ma fille me corrige, et ça, ça fait mal.

Malgré tout, je me sens bien parce que je peux aider mes enfants en calcul. Mais en tant que maman, je veux participer à tout.

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