Qui n’a jamais récité, en effeuillant la marguerite : « Je t’aime, un peu, beaucoup, etc » ?
Qu’est-ce que « aimer » ? On peut dire que l’amour est un élan du cœur qui nous porte vers un être. Cet élan est indépendant de toute réflexion et semble n’être qu’à l’écoute des sentiments. Cependant, la notion d’amour porte à réflexion.
Depuis l’Antiquité, les philosophes se penchent sur le sens à donner à ce sentiment, sur la valeur de l’amour et s’interrogent aussi sur les rapports entre aimés.
Ovide, poète latin, né en 43 av JC, rédige un ouvrage intitulé « L’art d’aimer ». Ce titre peut surprendre. Est-il utile, nécessaire, convenable d’enseigner cet art-là qui semble aller de soi sans qu’il faille donner des leçons ? L’originalité d’Ovide, fut de mettre le monde au féminin. Le poète veut donner la parole à la femme et lui accorder sa part entière et son initiative à ce jeu de l’amour, grave et léger, dont les siècles de « civilisation » l’excluaient. Les leçons du maître Ovide à son élève de « l’Art d’aimer » sont fondées sur l’existence de la femme en tant que personne humaine. Il est remarquable de voir qu’Ovide accorde cette fois à la femme, perçue comme objet, une sensualité au moins égale à celle de l’homme. Il laisse sous-entendre que l’acte d’amour a pour fin le plaisir et non plus, uniquement, la procréation.
Ce droit au plaisir, pour la femme, va, durant des siècles, être oublié. Dans cette joute des sexes, semée de pièges, de feintes, de leurres, Ovide nous apprend que tous les coups ne sont pas permis. L’approche doit être civilisée et respectueuse. On peut feindre et tricher, mais dans les limites qui désignent, au-delà de l’art d’aimer, un art de vivre en société.
L’essentiel de la morale d’Ovide réside dans le refus de la fulgurance de l’instant au profit de la durée. Il faut transformer la fureur physique en tendresse perpétuée. Dans cette mesure, « l’Art d’aimer » est un livre de la sagesse.
Ovide est toujours d’actualité au 21e siècle car les femmes perpétuent son combat en dénonçant les violences qui leur sont faites et en réclamant le droit de se faire reconnaître en qualité d’être humain à part entière.
Je conclurai en disant que l’amour est une aventure dangereuse que l’on entreprend dans le but d’atteindre le bonheur mais dont on ne connaît jamais l’issue.