Vous ne verrez pas dans ce texte le mot" Noël" et pourtant ces quelques lignes racontent " l’avant" et "l’après" de cette nuit de Noël tellement différente de ce que nous attendions tous !
Je n’ai pas voulu l’appeler " Nuit de Noël" car pour moi ce fut l’horreur et je voulais garder ces mots pour les douces soirées de Noël qui suivraient...nous l’espérions tous à cette époque.
Bastogne, dernière offensive Allemande
Hiver 1944/1945, funeste hiver pour les G I, la bataille des Ardennes est meurtrière.
Les Américains y subissent plus de pertes qu’en Normandie, l’hiver est rude et la « bête n’est pas encore morte » !
La guerre est repartie de plus belle dans les Ardennes, à la faveur de la neige et du brouillard.
Il faudra attendre le printemps suivant pour franchir le Rhin et enfin entrevoir la vraie victoire.
Il reste à écraser les nazis et les guerriers de la dernière heure
Il s’y ajoute ce qui fut appelé les V1, mais avec la belle insouciance des enfants que nous sommes toujours…la neige qui perdure signifie que les traîneaux sont de sortie et nous sommes loin de penser aux V1, que pourtant nous entendons passer au dessus de nos têtes.
Comme des chiens à l’arrêt, nous tendons l’oreille, l’engin pétaradant nous survole…continue…va plus loin…et une explosion lointaine nous annonce qu’il est tombé.
Aussitôt les glissades reprennent, les chutes, les cris, nous nous amusons comme des fous !
Il y a près de chez nous une petite ruelle en pente raide avec çà et là des nids de poules et quand il neige ou qu’il verglace, c’est notre montagne à nous…pas un piéton ne s’y aventure, et nous y sommes les rois !
La pente est magnifique avec juste ce qu’il faut de tournants et de bosses pour rendre la descente excitante, avec une attention particulière aux fils de fer barbelés qui clôturent certaines prairies et qui nous obligent à une gymnastique originale …il faut s’aplatir au maximum pour passer par-dessous et parfois une partie de nos pantalons restent accrochés à la clôture.
Souvent la nuit tombe lorsque nous nous décidons à rentrer, j’entends Maman qui s’époumone à crier mon nom et je rentre fatiguée mais heureuse, les joues rouges et les doigts gelés.
La soupe est servie …mes deux mains entourent le bol, la chaleur m’enveloppe et souvent je m’endors sur le coin de la table…le nez dans mon assiette.
Tout à cette époque ne fut pas aussi simple …
Je me souviens d’une soirée particulièrement agitée, on entend des V1 passer à une cadence rapprochée et soudain le grondement sinistre parait être au dessus de nos têtes et puis…l’arrêt…le silence …et presque tout de suite un fracas assourdissant.
Le V1 est tombé dans notre rue !
Nous nous précipitons dehors pour aider. Horrifiée, il me faut un bon moment pour comprendre que l’énorme trou béant que je vois est tout ce qui reste d’une maison voisine.
C’est la 1ere fois que je suis aussi près d’un endroit bombardé et la scène me semble terrifiante.
Déjà, les secours arrivent, il y a des blessés mais il y a surtout une énorme tragédie.
Une voisine que connaissons très bien donnait à ce moment le bain à son petit garçon et son réflexe a été de le prendre dans ses bras et de le couvrir de son corps.
Le chambranle de la fenêtre s’est arraché et l’a poignardée dans le dos, le petit garçon protégé n’a pas une égratignure, mais elle mourra dans les instants qui suivent.
Nous sommes tous sous le choc…Papa a des éclats de verre dans les pieds, il s’est précipité dehors pour aider et le sol est jonché de débris, de toutes sortes, c’est une image de désolation qui me reste dans la mémoire.
La rue est dévastée, les gens pleurent, ces sales Boches auront massacré des innocents jusqu’à la fin… je pense que jamais un pays n’a suscité autant de haine que l’Allemagne..
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Mamie j’aime beaucoup lire tes histoires .Je trouve qu’elles sont très intéressantes.
Antoine