Le 28 mars 2020.

Déjà 15 jours que personne n’est entré dans ma maison. Un méchant virus se promène sur la planète et vient nous empêcher de vivre notre vie habituelle.
Autour de moi, tout est tranquille et semble normal. Un clos dans une cité jardin, des habitants qui circulent à pied, en vélo ou en trottinette ? Quoi de plus habituel en 2020 ? Ici les voitures sont garées, endormies, et chacun circule à distance de son voisin. Comment imaginer l’agitation qui règne dans les hôpitaux et les centres de soins improvisés pour contenir l’épidémie ?

La situation est purement surréaliste, digne d’un film de science-fiction qui nous amuserait en temps normal, mais qui, aujourd’hui, nous stresse par sa nouveauté et l’inconnu de l’avenir.

Tous les jours se ressemblent pour moi, vivant seule (à 75 ans) depuis 10 ans et ralentie dans mes activités depuis 5 ans pour cause d’arthrose. La solitude, je connais donc déjà, et j’ai dû faire avec, adapter mon agenda en fonction de ma mobilité, trouver de nouveaux centres d’intérêt et de nouvelles façons de communiquer. Grâce à Dieu les nouvelles technologies sont bien intégrées dans mon quotidien et Whatsapp est mon ami quand je veux téléphoner à ma famille Canadienne ou voir des photos de ceux que j’aime, même s’ils habitent à proximité. Quand je pense aux séparations des familles durant la guerre, rien à voir évidemment. Aujourd’hui la crainte se focalise sur les risques de contamination et les retombées économiques et sociales de l’arrêt des activités, sans le bruit des bombes et la pression de l’occupant !

Que me manque-t-il alors après 15 jours ? Des repères dans ma semaine et des projets pour les mois suivants, la possibilité de créer un programme d’activités selon la météo et les évènements extérieurs, la possibilité de décider à tout moment d’entreprendre un déplacement, une visite, un achat… Les livres me manquent car je lis beaucoup et donne à circuler ce que j’ai lu, à l’exception de certains livres d’art et de réflexion.

J’ai donc décidé de mettre des repères dans ma journée, afin de pouvoir diversifier mes activités mais aussi de garder une régularité de sommeil et de repas. Ménage, toilette détente, travaux de jardins, courses, promenade avec photos de ce printemps insolent, repas, lecture, bricolage, rangement, information et détente TV, contacts téléphoniques ou sms, chaque chose en son temps et posé dans la journée de façon à ne pas sentir le vide et l’inutilité. Je cuisine aussi plus car certains produits manquent dans les rayons et je prends le temps de les préparer moi-même au lieu de les acheter tout faits, comme la confiture d’oignons que j’apprécie avec les hamburgers… Se faire plaisir reste une priorité pour ne pas déprimer.

Au début des restrictions je ne pouvais pas faire de vraies courses au supermarché car les files étaient trop longues. Aujourd’hui les angoisses de manquer semblent apaisées et il est possible de se lancer sans problème majeur. Je n’ai jamais eu ce besoin d’accumuler car sans doute n’ai-je pas de souvenirs de disette !
Me rendre utile me manque un peu, même si les seniors sont priés de rester confinés. J’essaie de prendre des nouvelles des plus fragiles. J’aimerais qu’il y aie plus de réseaux locaux de solidarité connus, quitte à mettre de petits avis dans les boîtes aux lettres pour ceux qui ne maîtrisent pas face-book ou instagram !

Mes enfants me manquent mais pas trop encore, car je n’ai pas l’habitude de communiquer de vive voix régulièrement. Par contre nous nous envoyons de petits messages sur un site familial qui génère des réactions directes et un peu d’humour pour relativiser les soucis ! Hier j’ai eu ma petite fille en ligne pendant une heure et on sent que les circonstances créent une certaine urgence de se dire des choses importantes et de partager un vécu extra-ordinaire. Ma fille m’a témoigné de sa peur de ne pouvoir être auprès de ses parents en cas de contamination, les seniors étant plus exposés. Cela m’a touché. Concernant toutes les difficultés matérielles et administratives en cas de décès, je l’ai rassurée en confirmant que j’avais tout mis par écrit pour leur information. Son père s’inquiète de la perte de revenus et de valeur du patrimoine à transmettre. Penser à ces questions matérielles alors que les personnes sont si seules pour vivre des moments éprouvants lui semble dérangeant. Pas de visite, pas de possibilité d’aller à l’enterrement de proches, quel manque en cas de problème !

Mais la créativité est là lorsqu’il s’agit de rester en contact avec les amis. Elle participe à un apéro virtuel chaque vendredi soir !

A suivre…

3 commentaires Répondre

  • Souris verte Répondre

    Réponse de JeannineK : Marie Noëlle, tuparles de science fiction : je n’ai jamais apprécié ce style et c’est vrai qu’en ce moment j’ai l’impression d’en faire totalement partie. Quel jour sommes nous ? je me pose cette question souvent. J’ai heureusement beaucoup de contacts avec les amis, la famille et même certainnes personnes perdues de vue qui m’appellent . J’aurai bientôt 83 ans. Je sens les enfants inquiéts pour moi et je me mets à leur place ; si c’était ma maman ? comment supporterais-je d’en être éloignée ? là je réalise que c’est plus dur pour eux que pour moi finalement. Des voisins m’apportent les courses, je sors me balader dans les rues désertes..Et je participe à des atleliers d’écriture. Je n’ai pas le temps de tout faire ! Le rangement attendra , bien que programmé depuis le début !merci pour ce texte qui nous donne le plaisr d’échanger

  • christian coen Répondre

    Dans cette impossible attente,on peut méditer sur ce qu’il vaut mieux : une présence absente ou une absence présente ? Tant d’indifférence et à présent ce besoin de nous sentir plus proches par un appel, un sms, le vingt heures du voisinage. Merci d’avoir bien formulé cette attente.
    Souhaitons un peu plus de réactivité dans ce qui se veut un carrefour des mémoires

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