Avant de réintégrer l’école pour l’après-midi, s’accomplissait le rite quotidien du passage dans le « bollewinkel ». Mot bruxellois pour définir le marchant de bonbons qui jouxtait l’école. Parfois riches d’un franc ou de cinquante centimes, nous nous introduisions dans la petite boutique tenue par une très vieille dame. Elle nous offrait à l’envie, des bonbons de toutes les couleurs, des sucettes, des lacets de caliche parfumés à l’anis, des sucres d’orge, des « lards » sorte de gomme molle et très sucrée.
Pour 50 centimes on achetait le sucre d’orge, rouge, long de 25 centimètres.
Le plaisir consistait à le sucer consciencieusement en le tournant sur la langue afin de l’effiler et d’obtenir une pointe étonnante.

 Hé ! Tu as vu la pointe chez moi ?

 Tu veux sentir comme elle pique ?

 Oh la mienne est plus fine, sens !

 Aie ! Tu fais mal !

Pour 1 franc, on pouvait acheter 4 bonbons, rouges de préférence, qui donnaient une coloration intense provoquant une compétition insolite de langues teintées.
Parfois, la générosité d’un parent nous permettait d’acheter une barre de chocolat Jacques. Dans l’emballage se cachait une image qui racontait l’histoire de Blanche-Neige, des valeureux Gaulois, de Robin des Bois. Ce qui donnait lieu, bien sûr, à des échanges d’images.

Les « bollewinkel » voisins de l’école, n’offrant à la vente que des friandises, ont aujourd’hui disparu. Pas rentables. Mais des générations de bambins s’y pressaient quotidiennement, s’agglutinant devant un étal tentant et coloré.
Hésitants, comptant leurs sous, joyeux devant le perspective du plaisir à venir.
Toute une ambiance !
Le franc en poche, entre l’heure du midi, je quittais la maison un peu plus tôt, uniquement pour avoir le temps de passer au petit magasin et de savourer avant la sonnerie de la classe, les sucreries tant convoitées.

4 commentaires Répondre

  • Anne-Marie Répondre

    ce texte me fait penser à ce que je disais à mes fils qui ont usé leurs culottes au collège Cardinal Mercier et ont fréquenté "Lulu" magasin de bonbons en tout bien tout honneur .... :lorsqu’au fil des ans (de leurs primaires et secondaires) ils me demandaient des sous pour aller "chez Lulu" je ne sais pas pourquoi je leur donnais l’argent en leur disant : qu’avec tout cequ’ils avaient dépensé au cours de ces années d’école, Lulu devait avoir une grosse villa en Espagne !!!" je repense à ces paroles chaque fois que je passe devant "le Collège", je suis grand-mère à présent.

  • Marinette Répondre

    Adorable texte ! Je fréquentais 2 "bollewinkel", le premier chez "ma tantje", celui du dimanche où je faisais le plein en allant à la messe ! L’autre près de l’école Ste Marie à St Gilles où je suis allée avec mes copines jusqu’à la fin de nos études de régentes, j’avais 20 ans et les lards étaient toujours aussi savoureux.
    J’en achète encore parfois pour ma fille Valérie qui a 41 ans. Nous sommes des éternels enfants.
    Marinette

  • Florilax@chello.be Répondre

    Ah ! les Bollewinkels ! le "mien" se situait à la Place Flagey, au coin de la Chaussées d’Ixelles. Cette place que nous nommions d’ailleurs plus couramment Place Ste Croix, du nom de l’église qui s’y trouve toujours, flanquée d’un côté du fameux "paquebot" connu à l’époque sous le nom d’I.N.R. (et à présent superbement restauré et ré-animé) et bordée par les Etangs d’Ixelles, lieu idyllique que fréquentaient les promeneurs du dimanche après-midi, par beau temps.
    Combien souvent nous avons parcouru ses merveilleux chemins, toutes les petites élèves de ma classe, en un rang bien ordonné, pour rejoindre l’Abbaye de la Cambre où nous avions alors la permission de nous disperser pour grimper en courant les escaliers qui nous menaient aus différents niveau du site... où nous nous perdions quelquefois.

    C’était il y a fort longtemps... quand mon grand-père, qui nous rendait visite à Bruxelles chaque mercredi, nous donnait à chacun, mon frère, ma soeur et moi, une pièce de 25 centimes...Avec cette grande pièce ronde, trouée en son milieu, nous pouvions chaque jeudi midi, dans la joyeuse effervescence d’une bande d’écoliers sortant de l’école et qui prenaient d’assaut la petite boutique "chez Junion", choisir parmi les merveilles de toutes les couleurs qui nous étaient offertes : un caramel, une "gomme", une petite souris, un gros cuberdon.. pour seulement 5 centimes ! J’ai oublié les prix des lacets, des bâtons de réglisse, des "caliches", des "boules sûres" et autres sucreries fondantes ou croquantes qui faisaient nos délices, mais Bon-Papa, chaque mercredi, avec sa pièce de 25 cmes, faisait de nous des enfants riches et nous nous endormions le soir en rêvant au plaisir de découvrir le lendemain d’autres gouts et d’autres couleurs... sachant que si nous le voulions, nous pourrions les multiplier par 5 !

    Mais le vrai pactole, nous le recevions en fin de trimestre quand, pour récompenser les bons résultats consignés dans nos bulletins, Bon-Papa nous donnait une pièce de 5 francs ! Nous devions mettre 4 francs dans notre
    tirelire et pouvions dépenser le reste... mais sans oublier toutefois la pièce de 25 cmes destinée au "petit nègre" qui trônait sur le comptoir de la boutique, et qui inclinait la tête en roulant des yeux ronds pour dire "Merci" à chaque fois qu’on lui donnait une pièce ’pour les enfants du Congo Belge’.

    Bien sûr, il y avait aussi du chocolat... Mais nous n’en achetions jamais. Car ma mère nous en donnait à chacun une petite barre, chaque jour, à notre retour de l’école. Elle sortait de l’armoire de cuisine une tablette de Côte d’Or, au lait le plus souvent, et en cassait trois barres qu’elle nous distribuait. Et à chaque fois reprenait entre nous trois le championnat commencé la veille : c’était à qui ferait durer le plus longtemps cette petite barre de chocolat, que nous léchions et croquions par morceaux minuscules pour les laisser fondre ensuite sur la langue.
    Je ne sais comment il faisait... mais toujours, mon frère restait le dernier, avec un mince morceau bien léché et parfaitement effilé par sa langue gourmande, qu’il nous promenait ensuite sous le nez avant de le terminer avec force grimaces de vainqueur.

    FLOX.
    21/11/04

    • Jacqueline Bouzin Répondre

      Que c’est joli ce texte dont les couleurs ravissantes évoquent des délices disparues ! Et ceci me rappelle que, en 1975, lorsque mon fils Bernard entrait en première primaire au collège Cardinal Mercier, la réunion de parents commençait par un grave avertissement du directeur recommandant aux parents de ne pas donner d’argent "pour fréquenter trop assidûment Lulu !" Etait-ce une femme de petite vertu qui allait entraîner sur le chemin du vice mon innocent bambin ? Après la réunion, je réclamais quelques informations supplémentaires. Ouf ! Lulu était la tenancière du magasin de bonbons situé à la sortie du collège...

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