L’histoire se passe en 1952, un soir d’été. Il fait très chaud. Il y a de l’orage dans l’air. Nous sommes à la campagne, près de Wavre, en Brabant wallon.

Des petites maisons ouvrières sont groupées les unes contre les autres le long d’une chaussée. À cette époque, peu de voitures circulent. Entre les groupes de maisons, on voit des prairies avec vaches et chevaux.

Des familles, souvent nombreuses, vivent dans ces maisons. Les hommes partent au travail très tôt le matin, vers 5 ou 6 heures. Ils vont à l’usine au village voisin. Ou ils prennent le train pour travailler à Bruxelles. C’est le cas de mon papa. Les femmes s’occupent de la maison : ménage, lessive, repas, couture, repassage, potager, enfants, courses… Elles ne se reposent pas beaucoup.

Vers 18 heures, les hommes rentrent du travail. Un bon repas familial réunit tout le monde autour de la table. La fatigue est là. Mais personne ne raterait ce moment délicieux : la veillée. Ce moment de détente entre voisins !

Sur le trottoir, devant la maison de Jean, de Laure ou de Denise, les adultes se réunissent. Ils viennent chacun avec leur chaise. Les enfants courent et jouent autour de ces petites réunions.

  Il fait très chaud et l’air est électrique ce soir. Un gros orage se prépare. As-tu vu ce ciel rouge ?

  Pourvu qu’il ne pleuve pas trop… mes pauvres légumes…

  J’ai entendu que la fille de Marie et Robert va se marier. Il paraît que la robe a coûté très cher. Où vont-ils chercher tout cet argent ?

Et, bla bla bla… Chacun apporte le dernier ragot, gentilles et méchantes nouvelles. On partage soucis et plaisirs de la journée.

Tout-à-coup, de grands éclairs violents déchirent le ciel. De gros bruits de tonnerre suivent. Impressionnant ! Cela dure longtemps, mais il ne pleut pas : c’est un orage d’été.

Moi, j’ai 13 ans. Je suis secrètement amoureuse du fils de Jean. Il s’appelle Marc. Il a 15 ans. Il ne me regarde pas. Je suis trop gamine. Je joue encore avec son petit frère !

Je me cache au fond du couloir de la maison.

  Marc, je n’aime pas cet orage, j’ai peur !

Il vient s’asseoir près de moi. Il met son bras autour de mes épaules et dépose tout doucement ses lèvres sur les miennes. Mon premier baiser ! Je suis au Paradis !

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