Extrait de "Nous racontons notre vie", à l’ONA, 2015-2016

Je suis Iranienne. Je suis venue en Belgique il y a 21 ans pour guérir mon mari qui étais dans le coma. Il est décédé en Belgique. J’ai une fille et trois fils. J’habite maintenant toute seule. Après le décès de mon mari, j’ai été très malade. Par après, j’ai commencé à apprendre le français. J’ai 7 petits-enfants.

J’ai 5 frères et une sœur qui vivent toujours en Iran. Je suis déjà retournée deux fois en Iran. On y parle le Persan. En Iran, j’ai un peu travaillé dans des crèches ; ensuite, je me suis occupée de mes enfants et de mon mari.

Entre l’Iran et la Belgique

Dans les années 1980, pendant la guerre Iran-Irak, nous avons envoyé nos trois enfants adolescents en Europe. Ils auraient pu être enrôlés dans l’armée pour faire la guerre.

Leur voyage a été très difficile : en voiture, puis à pied, ils sont passés par le Pakistan, par la Turquie, puis en avion jusqu’en Belgique et en Suède. On n’a pas choisi la Belgique et la Suède, on voulait juste sauver leur vie. On aurait voulu qu’ils aillent au Canada, mais ce n’était pas possible car on n’y connaissait personne.

Quelques années après, mon mari est tombé dans le coma à cause d’un accident. En Iran, il n’était pas bien soigné, alors les enfants ont dit de le faire venir en Belgique ou en Suède pour le soigner.

Je suis arrivée en Belgique avec mon mari dans le coma ; j’avais un visa touristique de 2 mois. L’arrivée en Belgique a été très difficile. Les médecins disaient que mon mari ne guérirait pas mais je ne voulais pas rentrer en Iran et je croyais qu’il pouvait guérir. Pendant deux ans et demi, on a vécu caché dans la clandestinité. En Iran, ma famille a vendu des terres… pour m’envoyer de l’argent. Je soignais mon mari à la maison car je n’avais pas assez d’argent pour engager des infirmières. J’avais appris à soigner mon mari en regardant comment les infirmières faisaient en Iran.

Et puis, la maison médicale a envoyé un kiné gratuitement et des médicaments. Pascale, qui travaillait à l’église, venait m’aider une ou deux fois par semaine. Je me suis inscrite dans une école pour apprendre le français et elle venait garder mon mari. On a vécu avec beaucoup de difficultés pendant 4 ans. En 1998, mon mari est décédé.

Quand mon mari est décédé, j’ai fait une dépression. J’ai été guérie grâce à un médecin iranien. Je pensais que jamais je n’apprendrais le français. Mon fils restait près de moi pour m’aider à apprendre le français. Je croyais que je n’étais pas capable d’apprendre et de vivre dans ce pays. Puis, je suis allée à la chambre de commerce. Ma vie a été très difficile. Mais j’ai été courageuse.

Maintenant je suis contente car mes enfants ont très bien réussi et ils vivent bien. C’est ce que mon mari voulait aussi. Deux de mes fils sont en Suède , un a fait un doctorat en mathématique, l’autre sur le cancer du sein. Mon troisième fils, vit en Belgique ; il est ingénieur informaticien et travaille pour plusieurs hôpitaux.

J’aime bien mon pays, l’Iran et j’aime la Belgique. Je suis retournée deux fois en Iran pour voir la famille ; j’y ai une sœur et quatre frères. Jamais je ne voudrais vivre à nouveau là-bas.

De la difficulté d’apprendre le français

En Iran, j’ai été à l’école normalement. J’ai appris à lire et à écrire le persan.

Je n’ai pas du tout appris le français en Iran et donc quand je suis arrivée en Belgique avec mon mari dans le coma, je ne connaissais pas un mot de français. À un certain moment, j’ai cru que jamais je n’apprendrais le français. Mais il fallait bien parler avec les gens. Quand le kiné s’occupait de mon mari, j’ai pu un peu commencer à apprendre le français à l’extérieur mais pas régulièrement. L’alphabet en français, ce n’est pas du tout la même chose qu’en farçi qui ressemble à l’arabe. Il a fallu réapprendre de zéro, essayer, essayer, encore essayer. Parfois, j’essayais jusqu’à 4 heures du matin après m’être occupée de mon mari. Je restais réveillée et je lisais en français avec un dictionnaire.

Quand mon mari est décédé, je suis tombée en dépression. Quand ma fille est arrivée en Belgique, je l’ai aidée. Maintenant, je peux aller régulièrement dans une association d’alphabétisation.

Aujourd’hui, le français reste difficile, il y a des mots que je ne connais pas, mais ça va mieux. Je dois toujours travailler. J’aime bien le français. Je suis contente quand je reçois une lettre en français et que je peux la lire, sans demander. Pour écrire une lettre, parfois je dois demander à l’assistant social, ou à mon fils. Depuis que je suis venue chez Marie-Paule, j’ai mieux appris à lire et à écrire.

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