Extrait de "Nous racontons notre vie", La Fonderie, 2013-14

En 1948, mes parents ont repris un atelier de colifichets (ornements vestimentaires), la Maison Kerstius, à Saint Gilles, derrière la maison communale. Ma grand-mère avait commencé cet atelier avant la guerre. Pendant la guerre, l’atelier a eu beaucoup de succès car les gens achetaient moins de nouveaux vêtements et plus de colifichets puisque c’était une manière de recycler les vieux vêtements avec des garnitures.

Mon père était comptable et ma mère couturière. C’était très artisanal. Ma mère dirigeait l’atelier. Chaque année, il y avait une nouvelle collection, ma mère créait de nouveaux modèles, elle était très douée.

Moi, vers 16 – 17 ans, dans les années 50, je ne voulais plus aller à l’école et je suis entrée dans l’atelier comme apprentie. J’ai été vite mise aux machines, puis au repassage, à la coupe, à l’emballage : j’ai fait de tout, y compris balayer l’atelier, ramasser les épingles avec les aimants, répondre à la porte. Nous étions une dizaine de personnes, c’était très varié.

Les ciseaux étaient durs à manipuler, j’attrapais des durillons.

Le fait d’être la fille du patron ne posait pas de problèmes car il y avait une bonne ambiance. Ma mère chantait tout le temps, nous chantions toutes en travaillant.

Tous les vendredis soirs, mon père payait les ouvrières ; moi je n’avais pas d’enveloppe, car je vivais chez mes parents et je préférais être gâtée que de recevoir un salaire.

J’ai travaillé là jusqu’à 25 ans, ensuite j’ai continué à la maison quand j’ai eu mon premier enfant. J’étais payée mais jamais déclarée. A cause de cela, j’ai perdu dix ans de pension.

L’atelier a fermé en 67, parce que la mode a changé, le prêt à porter s’est généralisé.

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