Il me reste peu de choses de l’histoire de ma famille.
Mes grands-parents maternels étaient décédés lors de ma naissance. Ils étaient d’origine allemande et leur situation socio-économique était des plus modestes. Lorsqu’il était question de ses parents, ma mère exprimait une certaine réserve que je ne pouvais que respecter.
Je dispose d’un peu plus d’éléments à propos de la famille de mon père. J’ai connu mes grands-parents paternels et, grâce quelques photos, noms et dates, je puis situer l’origine de cette famille dans une petite ville du Hainaut. Mes informations se limitent cependant à un document d’une page élaboré par mon père et reprenant des éléments généalogiques qui s’arrêtent à mon arrière grand-père.
Pas ou peu d’histoire donc et il y a comme un voile de gêne qui recouvre ce qui subsiste. Pas de crime, de forfait ou de secret inavouable, du moins je le suppose. Mais en quelque sorte une histoire qui longe les murs. Pourquoi ?
Bénéficiant désormais de temps - mais est-ce le seul motif ? - j’ai décidé de renouer le fil avec ce passé familial. Avec cependant une question : dans quelle mesure cette histoire m’appartient-elle ? N’y a-t-il pas lieu de respecter le silence que gardaient mes parents, ma mère en particulier ? Mais cette histoire était également mienne, la mettre à jour ne pouvait nuire à leur mémoire. A une condition pourtant : les investigations ne pouvaient être confiées à un tiers. Elles devaient être menées par l’un des enfants. Pourquoi pas moi ?
Je commençai à travailler à partir des maigres archives à ma disposition. Les recherches au sujet de la famille de ma mère n’ont guère porté de fruits. Par ailleurs, du fait de mon patronyme, poursuivre les recherches dans la branche paternelle équivalait à chercher une aiguille dans une botte de foin. J’ai ainsi opté pour une autre voie, plus gratifiante : la rencontre des quelques survivants. Tant du côté paternel que maternel, tout contact avait été rompu depuis de nombreuses années. Il y a peu, j’ai cependant retrouvé la trace de petits cousins, l’un du côté paternel, l’autre du côté de ma mère. Andrée, plus de 80 ans et ses souvenirs de l’oncle Octave (et son mystérieux revolver) et de parrain Emile, époux de Bertha, la coutière ; René, pratiquement mon contemporain, dont Internet m’ a révélé l’existence, qui vit dans la province de Luxembourg à deux pas de ma fille aînée.
Joie de renouer le fil d’une histoire, de retrouver quelque chose de mes racines ; en lien avec l’Histoire aussi, celle d’une région, de traditions oubliées.
Bonheur de l’explorateur, heureux de découvrir des traces qui lui permettent d’aller un peu plus loin, chaque fois un peu plus loin.
Etre un passeur enfin entre mes ancêtres et moi-même et mes descendants. J’ai l’impression d’effectuer ainsi un travail de « reconnaissance » à l’égard des uns et pour les autres.

2 commentaires Répondre

  • girouette Répondre

    L’idée du "passeur" me fait penser à une histoire que j’ai lue il y a quelques mois . Un enfant né dans un monde privé de couleurs, d’odeurs et de ressentis recoit la lourde tâche de devenir "Dépositaire de la Mémoire". Il est le seul individu avec le passeur (justement) à détenir le passé de l’humanité (à l’époque où les hommes vivaient des émotions, se faisaient la guerre et choisissaient leur destinée).
    Le Passeur transmet donc à l’enfant les epxériences de notre humanité (joies, douleurs, peurs, espérances). Ce passage est difficile et exaltant. Te sens-tu remplir le même rôle ?
    🙂
    Girouette

  • Michèle (A&T magu) Répondre

    Belle enquête "policière" en perspective ! Je voudrais connaître la suite !

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