Je suis heureuse de vivre dans un coin du Brabant flamand que j’adore. Un beau petit village dans la périphérie de Bruxelles. En Flandre donc, sans facilités pour les « étrangers », surtout francophones, qui l’habitent. J’y vis depuis vingt ans. Sans problème aucun si ce n’est, à de rares moments, quand je dois remplir certaines formalités administratives rédigées en flamand et dont certains termes m’échappent, même avec un dictionnaire. Il est vrai que ce serait peut-être pareil si ils étaient écrits en français.

Ceci dit, j’entends souvent des amis francophones me demander : « comment vis-tu ? As-tu des contacts avec tes voisins ? Et à la Maison communale - on dit qu’ils sont tellement flamingants ? qu’ils ne parlent que le flamand ? Et tes courses, où les fais-tu ? Est-ce que tu te débrouilles bien en flamand ? Il paraît qu’on ne peut pas dire un mot de flamand à l’église, même lors d’un enterrement... ; il paraît aussi qu’ aucune bibliothèque francophone n’est admise dans ta commune ? Il paraît aussi que des commerçants flamands de souche, ont des tas de problèmes quand ils font de la publicité dans une autre langue que le flamand (que ce soit en français mais aussi en anglais ou en allemand) ? Il paraît même que l’ « on » vient taguer des injures sur leurs vitrines ; il paraît...., il paraît.

Comme je suis heureuse et fière de vivre dans ma commune, je me dois de relativiser tous ces « on dit » qui sont pourtant et , malheureusement, bien fondés mais qu’il s’agit de contrer, en tout cas de faire la part des choses.

A la question récurrente de « « comment vis-tu ? » Je réponds toujours TRES BIEN ! Ai-je de bons contacts avec les voisins ? Oui, même, évidemment aussi, avec mes voisins flamands. Et quand je pars en congé, ce sont eux qui viennent, avec plaisir, vider notre boîte aux lettres, soigner et papoter (en flamand sans doute) avec notre chatte. Quelle chance pour elle et ..., pour nous !

A la maison communale : ce n’est pas évident pour quelqu’un qui ne fait aucun effort en flamand de se faire comprendre ! « Hier spreekt men Vlaams » Mais tout de même, les employés sont corrects et polis. Ils se doivent de suivre les directives d’en haut. C’est comme ça, c’est un fait. Ils ne peuvent parler aucune autre langue que le flamand. Oui, ça c’est dommage. Mais plus comique que dramatique quand on se trouve, comme cela m’est arrivé, à côté d’un couple de Japonais, qui ne s’exprimait qu’en anglais et avec quelques mots de français dont le Monsieur était très fier ! Le couple venait s’inscrire à la commune et avait plein de questions concernant notamment les transports en commun et les services de la voirie. J’ai servi d’interprète ; une dame flamande qui se trouvait derrière nous s’est fâchée sur l’employé communal et l’a traité d’incompétent. Tout s’est arrangé. Les braves japonais nous attendaient à la sortie, dans la rue. Penauds, intimidés. Après nous avoir remerciées, ils nous ont dit « la prochaine fois que nous devrons venir ici, nous nous ferons accompagner par un interprète ».

« Les courses ? » Mais je les fais dans mon village, bien sûr. Dans les grands magasins, je croise régulièrement les mêmes vendeurs ou vendeuses ; nous nous saluons in het Vlaams mais si j’ai besoin d’un renseignement « pointu » ou d’un conseil, par exemple sur une marque de vin, un dialogue bilingue s’installe. Et c’est très amusant.

Oui, c’est malheureusement exact que des tenanciers de petits commerces flamands n’osent pas faire leur publicité dans une autre langue que la leur ; ça ne leur plaît pas évidemment mais ils s’y font ; de toute façon, ils sont assez malins (dans le bon sens du terme) pour fidéliser les « étrangers », avec beaucoup d’humour à la clef. De part et d’autre. Personnellement, j’aime beaucoup discuter avec eux, avec ma coiffeuse surtout. Elle rentre son panneau « WELCOME » chaque soir. Elle devait, soit l’ôter, soit écrire WELKOM. lui avait-« on » imposé ! C’est bête et méchant mais si on sait contrer la méchanceté, la bêtise, elle, est souveraine.

A l’église : ça, c’est autre chose. On n’y prie qu’en flamand et aucune autre langue n’est admise lors des cérémonies. Même lors d’un enterrement. Alors, il est vrai que mon mari et moi désertons la pourtant si belle petite église de notre village, à tout jamais. Et c’est vrai que cela fait mal.

Il faut dire qu’il existe des messes « secrètes » - en français - chez tel ou tel particulier, un peu comme au temps des catacombes ! Elles ont beaucoup de succès et l’apéritif qui les suit aussi !

Oui, il y a une bibliothèque francophone : elle aussi est installée discrètement et c’est un lieu de rencontre bien agréable et joyeux, parce que, justement, on y éprouve un délicieux sentiment de transgression.

Ne nous laissons pas débousoller ! Il fera toujours bon vivre en Belgique ! Pour les Flamands : de Flandre, de Wallonie ou de Bruxelles ; pour les francophones : de Wallonie, de Flandre ou de Bruxelles.

Et vive Bruxelles, Capitale de l’Europe !

2 commentaires Répondre

  • Jessica Répondre

    Bonjour,

    Je suis journaliste française et je cherche à interviewer des francophones vivant en Flandre. Je voudrais juste comprendre la vie làs-bas. Est ce difficile ou non ?

    A vrai dire, je voudrais éviter de tomber dans certains stéréotypes. C’est pour cela, que j’ai beaucoup apprécié le texte de anne marie B. Comment peut-on la contacter ?

    Bien à vous tous

    Jessica

  • anne-marie falise Répondre

    Merci Rose Marie, pour cette expérience que vous nous racontez si bien, avec tendresse et humour, de la vie dans votre village. Ca correspond bien à ce que j’imaginais , moi qui vis dans le Condroz oµ nous recevons toujours avec le même plaisir, les nombreux touristes du nord qui aiment notre contrée ..Ils s’y plaisent beaucoup et nous sommes toujours ravis de les rencontrer.Bonne continuation. anne-marie falise.

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